Loi Alur et déclaration de mise en location
L’entrée en vigueur d’une disposition de la loi Alur votée en mars 2014 passe mal auprès des professionnels de l’immobilier. Celle-ci prévoit l’obligation d’obtention d’un « permis de louer » de certains propriétaires-bailleurs de biens immobiliers afin de lutter contre les problèmes d’insalubrité de certains logements en France.
En quoi consiste cette loi ?
La loi Alur votée il y a plus de deux ans ambitionne la mise en place de plusieurs réformes dont l’une d’entre elles applicable grâce à un décret d’application publié le 21 décembre dernier visant à « lutter contre l’habitat indigne et les copropriétés dégradées ». Concrètement, le décret permet aux conseils municipaux ou les établissements publics de coopération intercommunale qui le souhaitent de délivrer un « permis de louer » à tous les nouveaux propriétaires-bailleurs de leur commune. Ces derniers voient donc la longue liste des documents nécessaires à la mise en location de leur bien s’allonger un peu plus.
La situation du parc immobilier français
Avec environ 11 millions de biens immobiliers en France dont une bonne partie située dans de grandes agglomérations (plus de 200 000 habitants), le parc immobilier français est plus ancien dans les zones très fortement et très faiblement peuplées.1
2,3 millions de personnes, c’est le nombre de locataires vivant dans un logement dit insalubre selon une étude de la Fondation Abbé Pierre de janvier 2016.2 Selon l’INSEE, c’est près de 10% du parc de logements français soit 2,8 millions de logements qui présentent au moins trois défauts majeurs (humidité, infiltration d’eau, mauvaise isolation thermique, installation électrique dégradée, etc.).
On notera que ses études menées de manière indépendantes s’accordent sur le fait qu’une majeure partie de ses habitations insalubres se situent dans des zones urbaines de plus de 200 000 habitant ou bien dans des zones rurales reculées, ce qui implique qu’il existe une relation significative entre ancienneté et vétusté.
Les détracteurs de cette loi
Le président de la FNAIM Jean-François BUET commente cette nouvelle règlementation : « Nous voici de nouveau face à une mesure absurde qui va complexifier l’ensemble du marché locatif ». Une mesure certes plus contraignante pour les propriétaires-bailleurs qui s’apparente à une nouvelle entrave administrative mais qui a pour vocation à être utilisée de manière ciblée dans les milieux les plus défavorisés du territoire, qui compte encore en 2016 selon les chiffres du ministère du Logement et de l’Habitat durable près de 210 000 logement indignes.
Reste que les propriétaires récalcitrants sont passibles d’amendes pouvant aller jusqu’à 15 000 euros en cas de location d’un bien ayant fait l’objet d’un avis défavorable de la mairie.
La loi Alur décriée de toute part
Les propriétaires-bailleurs voient les conditions de location de leurs biens évoluer depuis la mise en place de multiples dispositifs provenant de la loi Alur. Selon une étude menée par l’agence immobilière Lodgis auprès d’un panel d’une centaine de propriétaires-bailleurs sur la capitale montre un durcissement de leurs pratiques que ce soit dans leur choix de leur futur locataire ainsi que dans l’entretien de leur bien immobilier. Plus de la moitié déclarent utiliser un complément de loyer afin de palier à la baisse des loyers prévue dans le cadre de la loi Alur (comme par exemple une terrasse, un jardin privatif, une vue atypique etc.) alors que seulement 17 % des propriétaires estiment avoir diminué le montant de leur loyer afin de s’accorder sur la nouvelle règlementation en vigueur.
Dès lors, on peut s’interroger sur les bienfaits des nombreux dispositifs prévus par la loi Alur dans la lutte contre les dysfonctionnements d’un marché immobilier encore réticent face à ces réformes souvent incomprises.
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1 Selon une étude de la Caisse des Dépôts Boucle Locale Optique : données sur le parc immobilier français
http://reseaux-chaleur.cerema.fr/wp-content/uploads/2008_Extrait_etude_CDC_Boucle_locale_optique___donnees_sur_le_parc_immobilier_francais.pdf
2 http://www.fondation-abbe-pierre.fr/21e-rapport-etat-mal-logement-2016