Le pacte Dutreil est un texte de loi qui, sous certaines conditions, permet de bénéficier d’une exonération partielle des droits de mutation lors d’une cession des titres à titre gratuit (à l’occasion d’une donation ou d’une succession). Ce dispositif ne s’applique que pour les sociétés exerçant dans le secteur industriel, commercial, artisanal, libéral ou agricole. Le pacte Dutreil est particulièrement avantageux puisque l’exonération partielle est matérialisée par un abattement de 75% pratiqué sur le la valeur des titres. En d’autres termes, le bénéficiaire (celui qui hérite ou qui reçoit ; celui qui paie les droits de mutation) n’aura à payer d’impôts que sur 25% de la valeur des titres. L’abattement permis par le pacte Dutreil étant cumulable avec les abattements relatifs au lien de parenté, la base imposable peut être considérablement réduite.
Le fonctionnement du pacte Dutreil
La chronologie du pacte Dutreil est la suivante :
- Avant la transmission, les associés doivent signer un engagement collectif de conservation des titres d’une durée minimale de 2 ans. Les conditions qui doivent figurer dans l’accord sont les suivantes :
- L’engagement doit porter sur au moins 17% des droits financiers et 34% des droits de vote (seuils abaissés à respectivement 10% et 20% pour les sociétés cotées).
- Au moins un des signataires ou un des bénéficiaires doit exercer, au sein de la société, son activité professionnelle principale ou une des fonctions de direction mentionnées dans l’article 885 O bis, 1° du CGI (si la société est soumise à l’IS) jusqu’à la transmission des titres.
- Au moment de la signature de l’acte de donation ou de la déclaration successorale (moment de la transmission), un abattement de 75% sur la valeur des titres transmis est appliqué (ce qui permet de réduire considérablement la base imposable au titre des droits de mutation).
Un des bénéficiaires ou un des associés doit exercer, au sein de la société, son activité principale ou une fonction de direction durant au moins trois ans à compter de la date de transmission des titres.
- Au terme de l’engagement collectif de conservation, les bénéficiaires (héritiers ou légataires) doivent signer un engagement individuel de conservation des titres. Les conditions de cet engagement sont les suivantes :
- L’engagement collectif de conservation doit être arrivé à son terme (sauf si l’engagement est réputé acquis ou qu’il s’agit d’une entreprise individuelle qui n’a pas été acquise à titre onéreux).
- Chaque bénéficiaire doit prendre l’engagement de conserver ses titres durant au moins 4 ans après la signature de l’engagement individuel de conservation.
L’engagement collectif de conservation est réputé acquis si le défunt ou le donateur exerce depuis au moins 2 ans son activité principale ou une fonction de direction et qu’il détient les seuils minimum requis en matière de droits de vote et de droits financiers. Toutefois, l’engagement collectif de conservation ne faisant l’objet d’aucune signature, ce sera nécessairement au bénéficiaire d’exercer son activité principale ou une fonction de direction une fois les titres transmis.
Si le défunt n’a pas signé d’engagement collectif de conservation et que ce dernier ne peut être réputé acquis, les héritiers ou légataires peuvent, dans les 6 mois qui suivent la date de décès, signer un engagement collectif de conservation.
Si, à posteriori, au moins l’une des conditions précédemment citées n’est pas respectée, l’administration fiscale peut remettre en cause les avantages du pacte Dutreil qui ont profité aux bénéficiaires. Ainsi, si un bénéficiaire ne respecte pas son engagement individuel en matière de conservation de titres, il sera tenu de s’acquitter des droits de mutation qu’il n’a pas versé à la suite de l’exonération partielle dont il a bénéficié grâce au pacte Dutreil. Ce montant est majoré de l’intérêt de retard. Dans le cas où la condition portant sur l’exercice de l’activité principale (pour les sociétés soumises à l’IR) ou sur l’exercice d’une des fonctions de direction (pour les sociétés soumises à l’IS) n’est pas respectée, l’ensemble des bénéficiaires devront s’acquitter des droits de mutation qu’ils n’ont pas versé grâce à l’exonération partielle permise par le pacte Dutreil.
Le cas d’une holding dans le cadre du pacte Dutreil
Lors de la transmission d’une holding, il est possible, pour le(s) bénéficiaire(s), de profiter des avantages du pacte Dutreil. En effet, l’administration fiscale considère qu’une holding animatrice exerce une activité commerciale et rentre donc dans le champ d’éligibilité du pacte Dutreil. Une holding est dite animatrice si :
- Elle participe activement à la politique de conduite du groupe et au contrôle des filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale.
- Elle fournit, le cas échéant, à ces filiales, à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers.
Dans le cas où seule une partie des activités des sociétés filles est éligible, la part du chiffre d’affaires de la partie éligible doit être d’au moins 50% du chiffre d’affaires total. De plus, le montant de l’actif brut immobilisé de l’activité opérationnelle doit être d’au moins 50% de l’actif brut total.
L’influence du pacte Dutreil sur les droits de mutation
Le barème fiscal des droits de mutation, entièrement à la charge du ou des bénéficiaires, dépend du lien de parenté entre le donateur ou le défunt et les bénéficiaires (héritiers ou légataires). Le taux fiscal ainsi que les différents abattements en fonction du lien de parenté figurent ci-dessous.
Pour une transmission en ligne directe (d’un parent vers un enfant, par exemple), le barème détaillé figure ci-dessous :
Pour une donation entre conjoints mariés ou pacsés (les successions sont exonérées d’imposition dans ce cas), le barème détaillé est le suivant :
À titre d’illustration, prenons l’exemple de Mme Y qui souhaite effectuer un don de ses parts, d’une valeur de 500 000€ à un de ses enfants.
Dans le cas présent, l’administration fiscale appliquera un premier abattement fiscal de 100 000€ car Mme Y effectue une donation à un enfant puis un second abattement au titre du pacte Dutreil. La base imposable sera alors de 100 000€ ((500 000 – 100 000)*0,25) et le montant total d’impôts à payer sera de 18 194€ (8072*0,05 + (12109-8072)*0,1 + (15932-12109)*0,15 + (100 000-15932)*0,2).
Si Mme Y n’avait pas eu recours au pacte Dutreil, la base imposable aurait été de 400 000€ et le montant total d’impôts à payer aurait été de 78 194€ (8072*0,05 + (12109-8072)*0,1 + (15932-12109)*0,15 + (400000-15932)*0,2).
Sources :
Pacte Dutreil transmission : tout ce qu’il faut savoir (lecoindesentrepreneurs.fr)
Pacte Dutreil pour la transmission de son patrimoine professionnel (gestiondepatrimoine.com)
Les barèmes des droits de succession et donation pour 2024. (corrigetonimpot.fr)
Le barème des droits de succession et de donation pour 2024 (lefigaro.fr)
Pacte Dutreil – Antoine Mousset (moussetavocat.fr)
Pacte Dutreil : conditions et exemple (finance-heros.fr)
Pacte Dutreil et holdings animatrices | Lefebvre Dalloz Compétences (lefebvre-dalloz.fr)